Une approche interactionnelle du changement

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Le modèle systémique de l’école de Palo Alto
L’Intervention Systémique Paradoxale est un modèle de résolution de problèmes humains issu des travaux de l’Ecole de Palo Alto.
Cette approche, élaborée dans les années soixante, par Richard Fisch, Paul Watzalwick et John Weakland, au Mental Research Institute de Palo Alto en Californie, à la suite des recherches de l’anthropologue Gregory Bateson, a tout d’abord été appliquée dans le champ de la thérapie. On l’appelait « thérapie brève » (brief therapy).
Son caractère non normatif et non lié à un répertoire en lien avec le pathologique a rapidement permis qu’elle soit utilisée dans d’autres contextes (entreprises, institutions, travail social, formation, urbanisme, etc.).
La théorie systémique propose une autre façon de voir le monde qui prend en compte, non plus les éléments isolés, mais des systèmes, c’est-à-dire des ensembles d’éléments en relation les uns avec les autres. Ainsi, dans l’approche systémique, l’être humain est toujours étudié en prenant en compte l’ensemble des personnes avec lesquelles il est en relation et ce, dans les différents systèmes dans lesquels il vit : sa famille, ses amis, son milieu professionnel, etc.
La complexité du comportement humain est comprise comme une résultante des interactions des individus les uns avec les autres au sein de ces différents systèmes.
Cette démarche ne repose pas sur des normes ou des diagnostics, elle se focalise sur les problèmes du présent et elle sollicite une participation active de la personne en vue d’un changement, défini selon ses propres objectifs.
Cette approche s’applique aussi bien à quelqu’un qui souffre directement d’un problème qu’à quelqu’un qui souffre du problème que lui pose un membre de son entourage.
La ligne directrice est avant tout pragmatique : proposer des outils efficaces et respectueux pour aider les personnes en difficulté psychologique et relationnelle en leur permettant de découvrir de nouvelles solutions concrètes.
On sait que certains événements du passé peuvent laisser des blessures importantes chez l’individu. Mais on ne peut jamais savoir si ces événements vont conduire cette personne à vivre dans une sorte de trou noir pour le restant de sa vie ou, au contraire, l’amener à développer des capacités hors du commun : les réactions de l’entourage, leurs commentaires, leurs réponses, peuvent modifier complètement l’impact d’expériences parfois très douloureuses.
On peut arriver à dépasser ces expériences terribles, on a le droit de vouloir qu’elles ne nous empêchent pas de tirer profit du reste de notre vie : les clés de la résolution du problème créé dans le passé ne sont pas enfouies dans le passé, elles sont dans la création actuelle du souvenir du passé, dans la façon dont nous y réagissons aujourd’hui.
C’est en les accompagnant dans leur présent qu’on permet aux personnes en souffrance d’apaiser leur passé, en les aidant à trouver des solutions aux difficultés engendrées par le passé dans leur vie actuelle.
Confrontées à des difficultés, les personnes tentent de les résoudre en mettant en place des solutions qui leur semblent logiques. Ces difficultés deviennent des problèmes et engendrent de la souffrance lorsque les tentatives de solution ne réduisent pas le problème mais au contraire l’aggravent. Par exemple, une personne confrontée à la peur de conduire une voiture va mettre en place un système visant à lui permettre d’éviter de se retrouver à la place du conducteur : prise des transports en commun, demande aux proches pour qu’ils conduisent à sa place, repli vers des activités plus proches et ne requérant pas de déplacement motorisé, etc. Ce qui semble être une solution adaptée peut rapidement devenir un problème grave : l’entourage ne peut plus faire face à cette absence d’autonomie, l’entreprise déménage et la personne perd son travail, etc.
Moins la personne se confrontera à sa peur, plus cette peur augmentera. La personne peut ressentir un soulagement immédiat par l’évitement de la situation qui lui cause de l’angoisse, mais un cercle vicieux se met en place car ses tentatives de solution et l’aide apportée par l’entourage lui confirment qu’elle n’est pas capable d’affronter sa peur. Elle perd donc confiance en ses capacités.
Dès lors, la cible du travail devient l’arrêt des tentatives de solution de la personne. La voie pour y arriver consiste à l’amener à prendre la direction opposée. Et pour ce faire, lui faire expérimenter une autre perception de la réalité qui petit à petit lui permettra de reprendre confiance en ses capacités.
C’est en recourant à des techniques adaptées fondées sur le dialogue stratégique, c’est-à dire l’utilisation de recadrages et métaphores appropriées, tout en testant les solutions par la mise en situation, que le changement souhaité arrivera.
Lorsque le changement est amorcé, c’est-à-dire lorsque la personne commence à réagir de façon plus « libérée » face aux situations qui lui posent problème, la première phase du travail est terminée. Il s’agit alors de consolider les changements acquis afin de les rendre plus « naturels », c’est-à-dire de les intégrer au répertoire de réponses de la personne. Cette phase est importante car elle permet à chacun de s’approprier le changement et de l’intégrer à son écologie personnelle.
Cette méthode de résolution de problèmes s’applique également en entreprise.
Les entreprises et les organisations en général sont en perpétuel changement. Systèmes ouverts sur leur environnement, elles nécessitent des régulations permanentes afin de maintenir leur raison d’être tout en s’adaptant à leur environnement.
Ces changements et transformations sont mis en œuvre par les collaborateurs qui les constituent. Or, il arrive que les collaborateurs résistent à ces transformations et par là même, mettent l’organisation en risque.
Pour débloquer ces situations, le diagnostic systémique et stratégique fonctionne de la manière suivante :
  • tout d’abord, déterminer les points sensibles du système et les meilleurs leviers de changement. Il s’agit d’investiguer les ressources et les limites des personnes concernées par le problème afin d’établir un diagnostic interactionnel. C’est un diagnostic dynamique et évolutif qui permet de mettre en évidence les enjeux du changement pour chacun
  • ensuite, définir de façon opérationnelle les problèmes rencontrés en tenant compte des différences de vécu de chacun des protagonistes
  • alors, repérer les modes inefficaces de gestion des problèmes et proposer une nouvelle direction stratégique pour les résoudre
  • et enfin, déterminer un objectif minimal pour l’intervention. Il s’agit d’un objectif clair, concret, réaliste et significatif qui évite la désillusion des attentes utopiques
De cette façon, les ressources se mobilisent plus facilement pour des interventions brèves et ciblées. L’atteinte de ces objectifs permet d’ancrer le changement, basé sur de nouvelles expériences.
Cécile STANER
Psychologue, Psychothérapeute
Thérapie Brève – orientation systémique
Meylan

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